Le Président de la république a convoqué le peuple à se prononcer le 20 mars 2016 par voie référendaire et a appelé, dans la foulée, à voter oui la réforme constitutionnelle proposée. Et, depuis lors, sans observer la retenue exigée par les lois et les règlements en vigueur, il a engagé ses troupes dans une campagne pour le triomphe. C’est dans cette perspective que ses partisans présentent la réforme comme progressiste et lui tissent une généalogie dans les « Assises nationales » et la CNRI. Tous les discours et arguments y passent et nécessitent une clarification. De la même façon s’élabore un rejet qui s’exprime dans des formes diverses. Dès lors, s’exacerbe une confrontation des opinions qui risque de diviser le pays en deux camps alors que la constitution qui, en principe codifie la volonté de vivre ensemble, devrait être un facteur d’unification.
« Tout est lié » nous enseignent toutes les grandes sagesses de telle sorte qu’il n’est pas possible de reprocher aux partisans du Président SALL de chercher à mettre en relation les propositions annoncées au référendum avec la situation sociale et économique. C’est ainsi que, dans cette perspective, certains évoquent à l’appui de leurs thèses le terrorisme qui marque le contexte géopolitique, le « banditisme » du PDS, le caractère progressiste du projet de réforme et sa conformité avec les « Assises nationales » et la CNRI, etc.
Il faut, tout de suite, dire aux ministres qui nous menacent du retour rapide du PDS au pouvoir qu’ils ne peuvent pas continuer à accuser des citoyens, fussent-ils des adversaires ou des détracteurs, de malfaiteurs sans en apporter la preuve et engager les poursuites judiciaires appropriées. A la place de cette désinvolture, une attitude plus responsable aurait exigé l’audit de la dette multilatérale et de toutes les politiques publiques. Le Président ne s’était-il pas engagé pour cela ?
En tout cas, s’il y a des milliardaires malfaiteurs, qu’ils soient au PDS ou dans quelque autre parti, il faut les identifier et les poursuivre devant la justice. C’est pourquoi ces ministres devraient plutôt être choqués par leur voisinage avec des personnes qui, quelques semaines auparavant, étaient suspectes pour le procureur.
En plus, ceux qui nous présentent comme repoussoir du « non » le retour rapide du PDS au pouvoir poursuivent exactement les mêmes pratiques que le défunt régime : l’interdiction des manifestations, la manipulation de la constitution, les intimidations et menaces, le culte de la personnalité, la création de structures clientélistes, etc. Pourquoi ne serait-il pas juste de refuser le cours actuel quand on a dénoncé la loi Ezzan, la dissolution-reconduction du sénat, etc. ? Ainsi, que cela soit sous le précèdent ou le régime actuel ces pratiques nocives doivent être rejetées.
Pour ce qui est de la menace terroriste, on ne peut pas l’évoquer pour rejeter le « non ». Au contraire, celle-ci aurait dû imposer aux tenants du pouvoir de chercher le grand consensus autour de la réforme constitutionnelle. Ce n’est pas ce qui est observé dans le discours va - t’en guerre du Président.
En outre, certains essaient d’étayer un caractère progressiste à cette réforme en lui trouvant une origine dans les « Assises nationales » et la CNRI. Cependant, ils oublient que les « Assises nationales » et les travaux de la commission nationale de réforme des institutions s’érigent contre l’hypertrophie du pouvoir du Président de la république et proposent l’élaboration d’une nouvelle constitution. Or, dans la réforme actuelle le Président reste toujours omnipotent. Les prérogatives concédées au Président de l’assemblée nationale dans la désignation des membres du conseil constitutionnel ne change pas le système.
Evidemment, le Président a renié son engagement pour une nouvelle constitution essentiellement pour asseoir son pouvoir personnel et dans une large mesure s’aménager le prétexte de conserver le mandat en cours. En effet, une nouvelle constitution qui aurait abrogé la constitution actuelle ne pouvait pas conserver le mandat de sept ans. On s’en souvient, pour contourner l’obstacle, les rédacteurs de la constitution de 2001 en avaient porté la mention dans les dispositions transitoires.
Ainsi, il est clair qu’en reniant à son engagement d’aller à une nouvelle constitution le Président SALL avait trouvé l’alibi pour récuser tous les autres engagements. Il restait ainsi chef de parti, Président du conseil supérieur de la magistrature et la séparation des pouvoirs était, peut être, renvoyée à une prochaine alternance. Assurément, les arguments évoqués pour justifier cette réforme par les « Assises nationales » et la CNRI ne résistent pas. En effet, celles-ci remettent en cause l’hypertrophie du pouvoir du Président. Or, la réforme du Président SALL conserve tout ce qui avait poussé le PIT à caractériser de « monarchique » la constitution proposée en 2001. C’est pourquoi, il est surprenant que la direction de ce parti baptise la réforme de progressiste. Serait-ce le fait des privilèges des dirigeants de ce parti ?
De toute façon, les bravades qui font croire au Président à une victoire de 80% ou 90% contribuent à le tromper et à précipiter son échec. A la vérité, la constitution du Président SALL risque d’être la plus rejetée de l’histoire du Sénégal car il a choisi délibérément de scinder le peuple en deux camps.
Or, le camp qui rejette cette réforme présente un spectre de positions qui se rejoignent dans la quête des valeurs. En effet, en plus de ceux ne se sentent pas concernés par le référendum, le rejet prendra la forme du boycott ou du non portés par des acteurs engagés formant ainsi une masse critique capable de se transformer en mouvement populaire constituant.
Sous ce rapport, il ne s’agit pas de s’alarmer sur le pourcentage qui sortirait des urnes, le plus important est que le rejet puisse participer à la mise en ordre de larges concertations susceptibles de féconder toutes les contributions et tous les travaux effectués sur la constitution. Un tel mouvement pourrait pousser le Président à remettre la main sur le métier ou à s’isoler davantage. « Alea Jacta Est », les dés sont jetés.
Le référendum, convoqué pour la réforme constitutionnelle, a fini d’installer le pays dans une scission en deux camps déroulant chacun un discours inaudible pour l’autre. Pourtant, la nécessité d’une réforme voire de la refondation du système est partagée par tous. Cependant, les contenus et les modalités des transformations sont rejetés par une masse importante qui pourrait s’élargir et prendre l’allure d’un nouveau mouvement constituant.
Au même moment, le camp présidentiel est traversé par des cassures et des fissures qui conduiraient inexorablement à son isolement et à son affaiblissement si l’aventure n’est pas arrêtée. Aussi, les leaders qui animent le rejet ont le terrible sacerdoce de dépasser leurs égoïsmes afin de préserver ce mouvement constituant naissant des trahisons.
Dés lors, les conditions de mobilisation pour une définition du contrat social dans une constitution largement partagée qui porterait les marques de l’histoire et de la culture du Sénégal.
Alioune DIOP
badadiop@hotmail.com
« Tout est lié » nous enseignent toutes les grandes sagesses de telle sorte qu’il n’est pas possible de reprocher aux partisans du Président SALL de chercher à mettre en relation les propositions annoncées au référendum avec la situation sociale et économique. C’est ainsi que, dans cette perspective, certains évoquent à l’appui de leurs thèses le terrorisme qui marque le contexte géopolitique, le « banditisme » du PDS, le caractère progressiste du projet de réforme et sa conformité avec les « Assises nationales » et la CNRI, etc.
Il faut, tout de suite, dire aux ministres qui nous menacent du retour rapide du PDS au pouvoir qu’ils ne peuvent pas continuer à accuser des citoyens, fussent-ils des adversaires ou des détracteurs, de malfaiteurs sans en apporter la preuve et engager les poursuites judiciaires appropriées. A la place de cette désinvolture, une attitude plus responsable aurait exigé l’audit de la dette multilatérale et de toutes les politiques publiques. Le Président ne s’était-il pas engagé pour cela ?
En tout cas, s’il y a des milliardaires malfaiteurs, qu’ils soient au PDS ou dans quelque autre parti, il faut les identifier et les poursuivre devant la justice. C’est pourquoi ces ministres devraient plutôt être choqués par leur voisinage avec des personnes qui, quelques semaines auparavant, étaient suspectes pour le procureur.
En plus, ceux qui nous présentent comme repoussoir du « non » le retour rapide du PDS au pouvoir poursuivent exactement les mêmes pratiques que le défunt régime : l’interdiction des manifestations, la manipulation de la constitution, les intimidations et menaces, le culte de la personnalité, la création de structures clientélistes, etc. Pourquoi ne serait-il pas juste de refuser le cours actuel quand on a dénoncé la loi Ezzan, la dissolution-reconduction du sénat, etc. ? Ainsi, que cela soit sous le précèdent ou le régime actuel ces pratiques nocives doivent être rejetées.
Pour ce qui est de la menace terroriste, on ne peut pas l’évoquer pour rejeter le « non ». Au contraire, celle-ci aurait dû imposer aux tenants du pouvoir de chercher le grand consensus autour de la réforme constitutionnelle. Ce n’est pas ce qui est observé dans le discours va - t’en guerre du Président.
En outre, certains essaient d’étayer un caractère progressiste à cette réforme en lui trouvant une origine dans les « Assises nationales » et la CNRI. Cependant, ils oublient que les « Assises nationales » et les travaux de la commission nationale de réforme des institutions s’érigent contre l’hypertrophie du pouvoir du Président de la république et proposent l’élaboration d’une nouvelle constitution. Or, dans la réforme actuelle le Président reste toujours omnipotent. Les prérogatives concédées au Président de l’assemblée nationale dans la désignation des membres du conseil constitutionnel ne change pas le système.
Evidemment, le Président a renié son engagement pour une nouvelle constitution essentiellement pour asseoir son pouvoir personnel et dans une large mesure s’aménager le prétexte de conserver le mandat en cours. En effet, une nouvelle constitution qui aurait abrogé la constitution actuelle ne pouvait pas conserver le mandat de sept ans. On s’en souvient, pour contourner l’obstacle, les rédacteurs de la constitution de 2001 en avaient porté la mention dans les dispositions transitoires.
Ainsi, il est clair qu’en reniant à son engagement d’aller à une nouvelle constitution le Président SALL avait trouvé l’alibi pour récuser tous les autres engagements. Il restait ainsi chef de parti, Président du conseil supérieur de la magistrature et la séparation des pouvoirs était, peut être, renvoyée à une prochaine alternance. Assurément, les arguments évoqués pour justifier cette réforme par les « Assises nationales » et la CNRI ne résistent pas. En effet, celles-ci remettent en cause l’hypertrophie du pouvoir du Président. Or, la réforme du Président SALL conserve tout ce qui avait poussé le PIT à caractériser de « monarchique » la constitution proposée en 2001. C’est pourquoi, il est surprenant que la direction de ce parti baptise la réforme de progressiste. Serait-ce le fait des privilèges des dirigeants de ce parti ?
De toute façon, les bravades qui font croire au Président à une victoire de 80% ou 90% contribuent à le tromper et à précipiter son échec. A la vérité, la constitution du Président SALL risque d’être la plus rejetée de l’histoire du Sénégal car il a choisi délibérément de scinder le peuple en deux camps.
Or, le camp qui rejette cette réforme présente un spectre de positions qui se rejoignent dans la quête des valeurs. En effet, en plus de ceux ne se sentent pas concernés par le référendum, le rejet prendra la forme du boycott ou du non portés par des acteurs engagés formant ainsi une masse critique capable de se transformer en mouvement populaire constituant.
Sous ce rapport, il ne s’agit pas de s’alarmer sur le pourcentage qui sortirait des urnes, le plus important est que le rejet puisse participer à la mise en ordre de larges concertations susceptibles de féconder toutes les contributions et tous les travaux effectués sur la constitution. Un tel mouvement pourrait pousser le Président à remettre la main sur le métier ou à s’isoler davantage. « Alea Jacta Est », les dés sont jetés.
Le référendum, convoqué pour la réforme constitutionnelle, a fini d’installer le pays dans une scission en deux camps déroulant chacun un discours inaudible pour l’autre. Pourtant, la nécessité d’une réforme voire de la refondation du système est partagée par tous. Cependant, les contenus et les modalités des transformations sont rejetés par une masse importante qui pourrait s’élargir et prendre l’allure d’un nouveau mouvement constituant.
Au même moment, le camp présidentiel est traversé par des cassures et des fissures qui conduiraient inexorablement à son isolement et à son affaiblissement si l’aventure n’est pas arrêtée. Aussi, les leaders qui animent le rejet ont le terrible sacerdoce de dépasser leurs égoïsmes afin de préserver ce mouvement constituant naissant des trahisons.
Dés lors, les conditions de mobilisation pour une définition du contrat social dans une constitution largement partagée qui porterait les marques de l’histoire et de la culture du Sénégal.
Alioune DIOP
badadiop@hotmail.com